Autohypnose, méditation

Je ne suis pas un pratiquant assidu de la méditation, mais je tente de l’intégrer de façon consciente dans ma vie comme on peut intégrer une pratique sportive ou artistique, avec toutes les difficultés classiques de motivation et de durée dans le temps.

J’essaye aussi, en tant que praticien et enseignant, de pratiquer l’auto hypnose dès que j’ai un moment disponible, pour tenir mes objectifs, quels qu’ils soient… (détente, focus, réduction de l’anxiété, …). Les deux pratiques me font du bien et présentent d’ailleurs quelques similitudes: détente du corps, paix de l’esprit et changements bénéfiques durables dans mes perceptions du monde, pourtant elles sont à mes yeux radicalement différentes.

C’est un sujet qui m’avait déjà frappé lorsque j’ai suivi ma formation en hypnose: de nombreuses inductions commencent comme des méditations guidées. Ces méditations se développent sur les Vlogs ou les applications pour smartphone; de ces méditations qui vous promettent de gagner en sérénité ou de réduire votre tension artérielle. Pourtant dans mon expérience quotidienne, l’hypnose ou l’autohypnose sont bien loin de la méditation, sinon dans la pratique mais au moins dans les buts poursuivis.

Voilà 4 ans que je propose a des étudiants en classe préparatoire de tester l’hypnose, la méditation et l’auto hypnose pour favoriser leurs apprentissages et les aider à assimiler, digérer, mémoriser les informations essentielles, leur (re)donner confiance et leur apprendre à repérer et utiliser leurs potentiels. Durant mes interventions, ces mêmes questions sont revenues : quelle est la différence entre une séance d’auto-hypnose et une séance de méditation?

Alors je suis allé chercher ce qui pouvait à mon sens différencier les deux, sachant qu’il existe peu d’études cliniques sur le sujet à ma connaissance; Krishnamurti nous apprend que « la méditation est un état d’esprit qui considère avec une attention complète chaque chose en sa totalité, non en quelques unes seulement de ses parties.  Et personne ne peut vous apprendre à être attentif. »^[1]

La méditation de pleine conscience exige en effet une conscience pleine et entière de ce qui est, au moment présent. Comme l’écrit Christophe André, « La méditation est une méthode, une façon de faire donc, mais destinée à nous permettre d’accéder à une nouvelle façon d’être. Le but de la méditation, notamment la méditation de pleine conscience, n’est pas de tenter d’accéder à quelque chose, mais d’être exactement là où l’on est, tel que l’on est, et de permettre au monde d’être exactement tel qu’il est à cet instant même. On décide de le comprendre avant de décider de le changer… » ^[2]

L’autohypnose est une forme particulière d’hypnose, dont le ressort principal est l’auto suggestion. Elle va « modifier les automatismes de l’inconscient en changeant sa logique. […] Lorsque nous avons des discussions intérieures, tout se passe au niveau du conscient, c’est à dire que nous échangeons avec nous mêmes des arguments logique ‘‘irréfutables’’, […]. L’autohypnose va consister à passer outre cet esprit logique, en ‘’l’endormant’’ ou en l’occupant ailleurs, et à glisser des suggestions ou des images directement à notre inconscient, ceci grâce à la transe. » ^[3]

Emile Coué l’avait déjà décrit au tout début du XXème siècle : « La suggestion n’existe pas en effet par elle-même; elle n’existe et ne peut exister qu’à la condition sine qua non de se transformer chez le sujet en autosuggestion. Et ce mot, nous le définirons comme ‘’l’implantation d’une idée en soi-même par soi-même’’. Vous pouvez suggérer quelque chose à quelqu’un; si l’inconscient de ce dernier n’a pas accepté cette suggestion, s’il ne l’a pas digérée, pour ainsi dire, afin de la transformer en autosuggestion, elle ne produit aucun effet. »^[4] E. Coué suggère ainsi qu’il n’est d’hypnose que de l’auto hypnose et nous rejoignons ainsi la question de départ concernant les similitudes entre l’hypnose et la méditation, résumée ainsi par Krishnamurti «Il existe différentes écoles et différents systèmes de méditation . […] Une autre méthode consiste à vous donner un certain mot et à vous dire que si vous le répétez très longtemps, vous aurez une expérience transcendantale extraordinaire. C’est une absurdité. C’est de l’auto-hypnotisme. »

Ce que nous apprend Krishnamurti c’est que la puissance de l’autohypnose n’a rien a voir avec les effets de la méditation sur le mental. En quelque sorte, bien avant les neurosciences, il explique la différence fondamentale entre la méditation et l’auto hypnose: La méditation permet un décentrage cognitif ( mettre à distance ses pensées et ses émotions en s’ancrant dans l’ici et maintenant, tandis que l’hypnose permet de réduire l’activité des zones corticales traitant l’information et de suractiver les zones facilitant l’imagerie mentale. ^[5]

De plus, même si méditer a des effets positifs sur le mental, la méditation doit se pratiquer sans objectif précis, autre que méditer. Les bénéfices viendront de l’implication et de la régularité. Cette énergie placée dans la pratique est également nécessaire lorsqu’on effectue des exercices d’autohypnose, mais les bénéfices arrivent souvent beaucoup plus rapidement. C’est pourquoi dans mon travail avec les étudiants j’utilise les deux approches : elles sont complémentaires et permettent à chacun de trouver les outils qui lui conviennent pour avancer et construire ses propres stratégies d’apprentissage.

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^[1]Krishnamurti, Se libérer du connu, Stock 1994. p. 147.

^[2]Psychologies n°1 Hors série bien-être Février mars 2020, Psychologies magazine p.39

^[3]Jean Michel JAKOBOWICZ, L’autohypnose c’est malin, Leduc.s éditions 2015

^[4]La Maîtrise de soi-même par l’autosuggestion consciente de Émile Coué, MacMay, 31 mars 2010 Edition numérique http://amzn.eu/2iGzRKp

^[5]Voir l’article d’Antoine Lutz, chargé de recherche au Centre de recherche en neurosciences de Lyon

Comment la méditation agit sur le cerveau